Prologue (Suite de "Laissez-moi leur dire !"
Je me regarde dans le reflet de la porte et je constate avec effroi que mes yeux ont la profondeur des ténèbres dans lesquelles je ne cesse de me noyer.
L’expression de mon visage enfantin n’est que souffrance, une souffrance que j’essaie de dissimuler pour ne pas lui donner le plaisir de voir à quel point il a fait de moi un pantin désarticulé.
Quand vient le soir, face à mes peurs, je prie pour mourir, mais ma haine contre lui est si tenace que mon instinct de survie prend le dessus. Alors, pour ne pas sombrer dans cet océan de détresse, j’imagine un monde dans lequel il n’existerait pas.
Mais… il y a toi !
Toi qui es devenu mon havre de paix.
Ta douceur panse mes blessures les plus secrètes.
Tes sourires me font oublier sa présence.
Grâce à toi, je suis déterminé à tout endurer, à tout supporter, mais dès que tu t’éloignes, mon courage disparaît et je sens cette boule d’angoisse remonter à la surface, prête à m’étouffer.
Pourquoi suis-je si vulnérable en ton absence ?
Pourquoi ai-je peur de perdre la raison ?
Impuissant face à ces craintes qui me submergent, je pleure en silence, priant pour que l’on vienne me délivrer.
Dans mes veines, coule le sang de mon bourreau.
Je me regarde dans le miroir et je vois maintenant l’homme que je suis devenu.
Dans mes yeux, il n’y a plus que de la colère.
Dans mon cœur, une rage folle prête à bondir.
Pourquoi a-t-on détruit l’innocence de mon enfance ?
J’ai combattu pour ne pas sombrer, mais ton départ m’a anéanti et je n’ai plus la force de lutter contre cette part d’ombre qui enveloppe progressivement mon être. J’ai pourtant tenté de devenir l’homme que tu voulais que je devienne, mais mes blessures invisibles et cette douleur lancinante ont fait naître chez moi un besoin de vengeance.
Aujourd’hui, je n’ai plus de place pour le Pardon.
Aujourd’hui, je ne suis que châtiment.
Dans mes veines, coule le sang d’un bourreau.
u.